Sentiment de jalousie envers les autres

Ce que je vais écrire, je n’en suis pas trop fière, mais comme ça me vient assez souvent en tête, aussi bien l’extérioriser une bonne fois pour tout…

J’ai souvent un sentiment de jalousie qui vient occuper mes esprits. Non pas de la jalousie face à mon chum, car j’ai toute confiance en lui et je sais que je n’ai absolument rien à craindre.

Non, la jalousie que je ressens, c’est plus face aux autres, ou plutôt face aux autres couples. Surtout, n’allez pas croire que je ne suis pas bien avec mon chum! Je l’aime et je suis bien avec lui, là-dessus, il n’y a vraiment aucun doute possible. Je suis heureuse avec lui et on a bien l'intention de faire notre vie ensemble!

Mais quand je me promène dans la rue et que je vois des couples déambuler paisiblement, quand je vais à la piscine et que je vois des hommes aller nager pour au moins prendre soin d’eux un peu, quand je prends le métro et que je vois des hommes qui semblent heureux et qui rient, ou même quand j’entends parler mes collègues de travail de leur conjoint, je ne peux pas m’empêcher bien souvent de ressentir un petit quelque chose, encore plus maintenant que la transition semble inévitable éventuellement.

Je ne sais trop comment l’expliquer. De la tristesse? De la nostalgie? De la jalousie tout simplement? Je ne sais pas trop... Je me dis que ce n’est pas juste que tout soit si parfait pour les autres et tellement moins simple pour nous deux. Il me semble que j’aurais préféré que ce soit plus « ordinaire ». Qu’il n’y ait pas toutes ces questions à se poser, toute cette situation à vivre.

Je sais que c’est une pensée purement égoïste, car je ne doute pas un instant que mon chum a dû se dire la même chose un nombre incalculable de fois. Il souffre constamment et lui le premier aurait préféré qu’il n’y ait pas tout ça. Mon sentiment n’est rien par rapport au sien… mais il n’en demeure pas moins qu’il m’arrive de penser ainsi.

Quand je vois les autres couples, ça me fait repenser inévitablement à « avant », quand je n’étais pas au courant et j’en éprouve une certaine nostalgie. Il me semble que c’était plus facile, qu’on souriait plus tous les deux, je n’avais pas toutes ces réflexions à me faire et la vie semblait tellement plus simple. Il me semble qu’on était « plus heureux » et qu’on profitait plus de chaque moment.

Bon, là, je me rends bien compte de l’aberration que je viens d’écrire. Mon chum n’a probablement jamais connu en tant que telle la période que je viens de décrire. Même si moi, je n’étais pas au courant, lui, il vivait déjà la situation et il en souffrait depuis tellement longtemps! Il cachait bien le tout et avec du recul, je me demande sérieusement comment il a fait pour ne rien laisser paraître pendant toutes ces années! Et je n’ose imaginer la souffrance qu’il devait ressentir en plus en devant toujours faire attention de justement ne rien laisser paraître et de toujours faire semblant d’être heureux!

Et lorsque je prends le temps d’y réfléchir posément, je sais bien que pour tous les autres couples que je vois, rien n’est parfait non plus et chacun a ses problèmes, ses « bibittes » et autres choses que je n’envierais pas du tout.

Il y a assurément pleins de gens qui souffrent en silence pour de multiples raisons et qui font « semblant », comme mon chum le fait en général lui-même. Plusieurs doivent composer avec la maladie, qui est à mon avis bien plus terrible que ma situation actuelle. Il y a peut-être des couples que je rencontre qui sont « souriants », mais qu’une fois chez-eux, le sourire disparaît et fait place a des problèmes de violence, d’alcool, d’abus, de dépendances, d’infidélité, alors que rien ne laissait présager ce genre de choses sur la place publique.

Et j’en passe! Je sais bien qu’on ne peut pas se fier aux apparences et ce qui visuellement me fait envie, ferait peut-être que je me sauverais en courant si j’apprenais la vérité!

Je suis bien consciente de tout ça. J’ai quand même beaucoup de chance comparativement à d’autres : on est relativement en santé tous les deux, j’ai une confiance absolue en mon chum, notre amour est fait de confiance, de tendresse, de joie, d’humour et d’affection et le tout se vit sincèrement et simplement. On vit relativement bien et on s’entend bien chacun avec nos familles respectives ainsi qu’avec la famille de l’autre. On a des goûts communs, des projets qu’on partage, une vision assez semblable de la vie tous les deux et on n’a aucun problème majeur dans notre couple.

La dysphorie de genre, c’est quelque chose de gros, de complexe et pas nécessairement de facile, encore moins pour la personne qui le vit directement, mais ce n’est pas la fin du monde non plus. Il y a des moyens pour que mon chum se sente mieux et on va les prendre s’il le faut, car je désire vraiment qu’il soit heureux. Notre amour est fort et nous réussirons à surmonter toutes les étapes qui nous attendent, et au final, notre amour et notre complicité n’auront que grandi encore plus.

Mais pour le moment, j’ai encore quelques pincements au cœur quand je pense à tout ça... preuve qu’il faut vraiment que je continue mes réflexions et mon cheminement, car l’acceptation n’est pas encore tout à fait établie et totale.

Et pour la jalousie dont je parlais plus haut… Ça arrive à l'occasion, mais ça ne dure jamais bien longtemps, car je repense à toute la chance que j’ai malgré tout.

Voyez ça comme un message un peu plus sombre, par une journée assez grisâtre, alors qu’une certaine fatigue des derniers jours commence à se faire sentir et que je commence à m’ennuyer sérieusement de mon chum. Ce n’était que passager et n’en veuillez ne pas trop en tenir compte!